Chaque semaine on vous fait découvrir un cinéma particulier et original, en France ou à l'étranger. Cette fois-ci, traversons les frontières, loin, très loin, jusqu'en Corée du Sud, où une chaine de cinémas tente des choses très novatrices, notamment à Séoul. Un groupe qui a décidé de ré-inventer l'expérience cinéma, en faisant de ses salles des produits expérimentaux, qui re-définissent complètement le rapport du spectateur avec la structure et le film projeté.

La chaine de multiplexes CGV Cinemas a des moyens, et est présente dans de nombreux pays, dont les États-Unis. Mais c'est en Asie qu'elle a le plus de succès, si bien que les responsables ont décidé de faire des salles Sud-Coréennes les pilotes de projets expérimentaux. Ici, on ne parle pas d'expositions d'art moderne du Palais de Tokyo, mais d'un espace de la salle complètement repensé pour offrir une nouvelle expérience au spectateur, et qu'il est intéressant d'interroger au regard de notre cinéphilie française, Ôh, nous, les inventeurs du Cinéma.


L'une des expériences proposée consiste en une salle conçue en partenariat avec les casques Beats by Dre, qui offre la possibilité au spectateur installé dans son siège d'écouter le son du film au casque audio. Ça n'a l'air de rien comme ça, mais ça signifie que vous n'entendez plus du tout les réactions du public autour de vous, notamment les rires qui, on le sait, influent grandement sur l'inscription du film dans la mémoire de chacun. À l'inverse, vous risquez de ne pas vous rendre compte de vos cris ou vos rires, et pour un observateur extérieur, cette assemblée de spectateurs pourrait ressembler à un asile. Quoiqu'il en soit, c'est toute la socialisation à l'oeuvre dans la salle qui est ici remise en cause par ce système. Mais il présente aussi l'avantage de permettre de ne pas entendre vos amis un peu pénibles qui commentent tout ce qui se passent à l'écran.


Le deuxième type de salle est celui qui mise sur le confort. La chaine en a développé un grand nombre. On aime beaucoup celles qui ont installé d'énormes poufs en guise de fauteuils (voir photo en tête d'article) ainsi que la salle équipée de sièges en fourrure léopard, qui semble plutôt destinée aux fétichistes tant à première vue nous ne voyons pas comment elle a un impact sur le confort, ni l'expérience. C'est presque un gadget, et on soupçonne le directeur de CGV Cinemas d'avoir voulu matérialiser son côté sauvage.


Salles privée, de luxe, immersion maximale... l'avenir de la salle ?


Dans un mouvement de montée en gamme des cinémas, visible également en France, la chaine mise aussi sur des séances privées, avec tables design, serveurs et champagne à volonté, dans un espace idyllique. L'une des innovations est aussi cette salle-bibliothèque, qui allie ici deux fonctions de lieux? On se saisit pas bien comment la projection fonctionne dans ces cas là, mais c'est comme tout, il faut le voir pour y croire. Cependant, ce qui change avec cette double fonction, c'est l'a ré-introduction de la lumière dans l'espace de projection, qui ne permet pas une médiation totale entre le film et le spectateur.


La chaine mise enfin sur une salle proposant une immersion totale dans le film, grâce à la 4D. Sièges mouvants, projection d'eau et de vent simulant une tempête, impression de vitesse par des mouvement brusques, tout y est. On se croirait au Futuroscope. Mais il semble tout de même que ce système sera bientôt dépassé par l'arrivée de la réalité virtuelle au cinéma, dont une salle aux Pays-Bas en a déjà fait sa spécialité. D'autant que cette 4D (qui n'est qu'un terme générique, car ce système n'inclut pas l'ajout d'une quatrième dimension. Seul Matthew McConaughey a pu l'explorer.) induit un engagement total du spectateur, qui risque d'être épuisant sur la longueur, tout comme il exclue d'office le port de lunettes, ainsi que le maquillage pour les filles. Pas sur que ça soit du meilleur effet.

Ainsi, se concrétise dans ces expérimentations une sorte de laboratoire de l'avenir de la salle, qui semble miser sur une amélioration, voire une dérivation, de l'expérience du spectateur. Reste à savoir si le public suivra, et en France, ces initiatives sont encore timides pour le moment. Mais les Asiatiques sont souvent les pionniers, et si vous habitez en Corée du Sud, ou êtes de passage à Séoul, il ne tient qu'à vous d'en faire un succès.