Né à Boulogne-sur-Seine, Michel Deville est entré par la petit porte dans le milieu du cinéma, gravissant un à un les échelons qui le mènent à la réalisation et faisant preuve d'une abnégation sans faille pour produire ses propres films. La plupart du temps, il est d'ailleurs producteur et scénariste de ses longs-métrages.
Ironie du sort, Michel Deville commence à tourner pendant la Nouvelle vague, sans jamais y appartenir, préférant produire et réaliser ses trois premiers films (Ce soir ou jamais en 1960, Adorable menteuse en 1961 et A cause, à cause d'une femme en 1962) en marge de ce réseau. S'il partage avec eux un goût pour la légereté des moyens de tournage et la liberté formelle, il ne profite pas du succès des "jeunes turcs" ni de la cure de jouvence qu'ils imposent à l'économie du cinéma français.
Deville poursuit d'ailleurs par une série de films de commande (L'appartement des filles en 1963) ou Martin Soldat en 1966) principalement par souci de renflouer les caisses de sa société. Bien qu'utilitaire, cette expérience lui permet toutefois de s'exercer à plier gentiment les codes du film de genre et d'affiner sa méthode.
Les succès critiques se confirment à la fin des années 60, avec un Prix Louis Delluc pour Benjamin ou les mémoires d'un puceau (1967) et une sélection à Cannes pour Raphael ou le débauché qui marque la fin de la collaboration avec Nina Companeez. Cette rupture associée à la réalisation de La femme en bleu en 1972 (qu'il considère comme "son second premier film") est le début d'une nouvelle ère pour Deville. On y découvre un travail de déconstruction narrative et la présence de thèmes désormais caractéristiques de son oeuvre : le désenchantement et l'association du désir assouvi, de la féminité et de la mort.
Les films de Deville se transforment alors en puzzle, parfois brillants (Le Paltoquet en 1986), parfois vains (Eaux profondes), mettant en scène des jeux de manipulations pervers entre des êtres soumis à la loi du désir. Son souci du détail et une tendance à céder aux modes visuelles prend parfois le pas sur l'inspiration formelle mais produit des oeuvres marquantes comme Le Dossier 51 (1978), La Lectrice (1988) ou Nuit d'été en ville.
Un peu moins en verve à partir des années 90, Deville se fait plus rare, préférant revenir à des réalisations plus sages, film de genre classique (Toutes peines confondues en 1991) ou ludiques adaptations littéraires comme La Maladie de Sachs (1999) et Un fil à la patte en 2005, où il revisite avec un certain plaisir le vaudeville de George Feydeau.